Welcome to
the temporary world, le sas d’entrée du nouveau monde.
Jour +3 :
( jour 1 étant le jour de la prise de conscience, qui évidemment est propre à tout un chacun).
Ce matin, je me suis levée à 6:30. Nous sommes le lundi 16 mars 2020.
Vendredi 13, 内森 et 卢卡斯 ont appris qu’ils seraient confinés, assignés à résidence,
le contact extérieur en video-conférence.
On s’est tous retrouvés embarqués dans cette aventure dont on ne connaît pas la fin. Je vais tout taper comme ça, je crois. Ça sera brouillon, comme mon esprit à la maison. C’était le vendredi de la ruée vers le papier toilette, samedi et dimanche je rentre bredouille. Il restait deux paquets de lingettes. Je les ai pris, puis, j’ai culpabilisé.
Qui a crier « gare » ?
On nous a appris vendredi que des mesures de
distanciation sociale devaient être mises en place : 1,50 de distance à respecter entre chaque être
humain sur cette planète. L’OMS a déclaré l’état de pandémie, on est tous
invités à rester dans nos lits.
Écrire ses mots me semble toujours irréels. Comment pourrions-nous nous habituer à quelque chose de tel.
Dans certains pays, on ne peut plus sortir de chez nous sans avoir écrit les raisons de nos déplacements sur un papier. Pense à tous les isolés, à tous les paniqués, à tous les maltraités, aux prostituées, à ceux qui ont eu le courage de migrer, à ceux qui ne seront plus payés. De 150 à 300 euros d’amendes vous seront réclamés pour non-respect des consignes dictées.
C’est le récit d’une épopée dont nous sommes tous les héros. A la gloire du personnel soignant, des agents de la propreté, des vendeurs dans ton supermarché et de la pharmacienne qui rêverait secrètement de pouvoir fermer. La suppression des libertés
pour la salutation collective.
Et je fais partie des privilégiés dans cette crise.
J’ai un travail, de l’argent, j’ai 27ans, j’ai une bonne forme physique et je
vis avec 3 amis qui favorisent l’entraide. LAVEZ VOUS LES MAINS. Mais ne serait-ce
pas un mécanisme basique qui rassure quand on ne sait véritablement pas ce
qu’il faudrait faire ? Partir en paranoïa est très facile comme vous pouvez le
voir. Seuls des rares choses sont rassurantes et il est difficile de focaliser
son attention sur autre chose. Dans 3 jours mes mains seront brulées, à force
de les frotter.
Je sais que je ne sais pas et
ceux qui pensent savoir en savent encore moins.
Bref, ce matin, 7:30, je suis allée travailler. On nous dit d’éviter les transports publics alors j’ai repris mon skateboard que je n’avais plus utilisé. Rue de Laeken-Yser-Rogier-Rue de brabant-Robiano-Chée d’Haecht. Pratiques individuelles à vocation collective.
Paysage apocalyptique, ce quartier pourtant toujours pleine de vie était vide, déserté de tous. J’ai peur, je ne leur dis pas.
Lundi 18h26, on est tous en télétravail. Obligés à rester chez nous. Les mesures de confinement semblent progressives. Comment les faire accepter ? Notre vie va changer, pour combien de temps ? Peut-être pour toujours. Il y a une semaine, on entendait parler du lockdown en Italie, 伊斯梅尔 rentrait de Milan.
Ryanair sur le tarmac. Pas de contrôle en arrivant.
On est en période de débordement des
imaginaires.
Du « mon temps je ne sais même plus quoi
en faire. »
On avait tous besoin de ralentir.
Maintenant.
J’espère qu’on finira par en rire.
Mercredi 18 mars.
De retour pour travailler : contrainte d’y retourner. Le personnel de nettoyage n’aura jamais autant frotté.
On laisse les portes ouvertes pour éviter de les toucher. Il n’y a plus de masques pour le personnel hospitalier. S’ennuyer est un luxe de privilégiés : perdus à l’idée de devoir s’occuper.
Comment se formalise l’entraide dans le confinement ? Crie à ta fenêtre à 20h. Comment on continue quand tout s’arrête ? Et l’éloignement, a partir de quand il rapproche ?
Bref, je suis retournée travailler et c’est particulier de devoir tous s’éviter.